COMPTE RENDU DE DANIEL F.
Le Barou (commune de Valflaunès), mare de Saint-Etienne de Gabriac (commune du Rouet) et Le Patus (commune de Mas-de-Londres)
Comme dans toute grande œuvre théâtrale, ce jeudi nous avons eu droit à trois actes plus un entracte. Les trois principaux co-auteurs de la pièce, Pascal, Christian, Patrice plus Louis qui nous accueillait chez lui pour la première partie de l’herborisation et pour la pause-déjeuner (à un tel niveau de qualité, on ne peut plus parler de vulgaire casse-croûte) n’ont pas ménagé leur peine afin de réaliser une sortie référence, pour employer un terme sportif, tant au plan botanique (même les insectes ne furent pas oubliés) que paysages et météo (la chance sourit aux audacieux).
De l’audace, il leur en a fallu pour nous amener, en partant à une heure indue, visiter ces coins plus ou moins humides du nord de Montpellier où notre association n’est pratiquement jamais allée à l’exception de l’an dernier quand Christine avait lancé un premier raid prometteur. Pour tout dire, la journée n’a pas commencé sous les meilleurs auspices puisque notre guide habituel est arrivé plus de 15 minutes en retard après s’être perdu (et, par la même occasion, ses 3 passagers) du côté du Pic Saint-Loup. Après les salutations de Louis, maître des lieux, ami et ancien collègue de travail de Pascal et la présentation par ce dernier des terrains à explorer, le groupe, augmenté de plusieurs montpelliérains, s’est lancé à la recherche des fleurs promises.
D’abord dans une zone mollement humide puis autour d’une mare, ensuite le long d’un champ à messicoles et enfin sur un petit délaissé récemment trempé mais, ce jour-là , sec en surface. Première surprise, nous avons marché au milieu des Anacamptis coriophora ssp fragans presque toute la matinée. Il y en avait des dizaines et moi qui n’en avait jamais vu ! Quelques mètres après le départ, Pascal a attiré notre attention sur un spécimen qui visiblement était un hybride entre l’Anacamptis ci-dessus et Serapias vomeracea qui lui aussi était présent en nombre, alentour. Vous pourrez juger du résultat grâce à la photo de Michel jointe au compte rendu. Bizarre, non ? J’ai recherché, en vain, le nom de ce taxon. Une opportunité pour Pascal d’inscrire son nom dans la grande taxonomie mondiale ? La mare proche nous tendait les bras. Elle était couverte de Baldiella ranunculoides ssp ranunculoide (liste rouge mondiale de l’UICN niveau « Quasi menacée »). Malheureusement, quelques scories de notre civilisation moderne émergeaient entre les fleurs : fils de fer rouillés, carcasse d’un berceau, tuile cassée …Pour éviter ces dépôts sauvages, il paraît qu’il faut éduquer les gens. Je crains que le mal ne soit beaucoup plus profond que cela, hélas. J’y ai également trouvé Ranunculus trichophyllus (liste rouge mondiale de l’UICN niveau « Préoccupation Mineure », certes mais quand même !) un peu perdue à la surface de son eau vitale à l’irisation tout à fait artificielle. Après avoir passé en revue des Genista tinctoria aux fleurs largement béantes, des aériens Chrysopogon gryllus et des graciles Briza minor, nous avons atteint la parcelle de céréales à «l’ancienne» et quelques unes de ses plantes associées : Legousia speculum-veneris, Ranunculus arvensis ou à l’écologie proche : Trifolium lappaceum, Alopecurus myosuroides, Lolium rigidum …Les lieux étaient, également, riches en knautia collina. Pas le temps de s’attarder car Christian était déjà en train de sonder le délaissé de terre largement dénudé, à l’extrémité de notre parcours matinal. Après des recherches aussi minutieuses qu’énigmatiques pour les spectateurs, il nous montra d’un doigt tremblant d’émotion retenue une brindille millimétrique perdue dans un désert (à son échelle) d’argile gravillonneuse. L’assistance s’apprêtait à rire sans vergogne de la plaisanterie lorsque Pascal et Patrice, le plus sérieusement du monde, s’accroupirent à leur tour et commencèrent à fureter à qui mieux-mieux en balbutiant Polygala exilis ! C’est ainsi que je fis la connaissance de cette plante très très furtive. En plus, en cet endroit, elle n’était pas encore fleurie …Pour satisfaire l’objectif photographique de mon compact, totalement inaccessible à des beautés aussi minuscules, je m’approchais du buisson proche et mitraillais les magnifiques fleurs d’Erica scoparia. Tout le groupe tourna alors les talons pour revenir au point de départ synonyme de nourritures goûteuses et personnalisées.
Mais, au parking, Louis nous attendait pour nous entraîner dans la cour de son mas où il avait dressé une grande table (avec nappe !) entourée de bancs, à l’ombre d’un vénérable mûrier blanc (Morus alba) que j’ai eu le temps de contempler par en-dessous lorsque je levais le coude et la tête pour me désaltérer avec les nombreux liquides en circulation. Le réflexe du botaniste qui reste lucide en toutes circonstances …Un repas de fête ! Nous avons eu quelques difficultés à quitter les lieux, pas seulement à cause de l’ombre, après avoir chaleureusement félicité et remercié notre hôte.
Le transfert vers la seconde étape de notre virée a été totalement délirant puisque la vingtaine de voitures mobilisée pour notre transport s’est retrouvée éparpillée dans toutes les directions dans la banlieue (c’est une image) de Valflaunès à la suite d’une manoeuvre imprévisible de Patrice qui a tout simplement tiré le convoi sur trois à quatre kilomètres dans la direction opposée à celle souhaitée. Le demi-tour a été fatal à bon nombre de conducteurs totalement inaptes à intégrer autant de données contradictoires après ce déjeuner royal. J’en étais. Les portables plus Pascal, en serre-file, ont tout de même réussi à regrouper le troupeau juste avant le parking de la chapelle Saint-Etienne de Gabriac. De là , un sentier rocailleux à souhait, descendait à la mare aperçue en bord de route.
La liste établie par le Badaud vous détaille les plantes identifiées. Vous y retrouvez le Polygala exilis qui nous a servi de fil rouge une bonne partie de la journée. L’image agrandie prise par Michel vous donne un aperçu de la difficulté d’être photographe naturaliste, la corolle mesure environ 2 mm de long !!! En cet endroit, ces polygales étaient en avance par rapport à leurs collègues du matin puisqu’ils étaient en fleurs. Je ne serai pas étonné si on me disait que cette espèce est sous-observée et donc sous représentée dans les relevés de terrain.
Pour changer, rallier l’étape suivante, notre dernier arrêt de la journée, n’a pas été aussi facile qu’escompté. Au moment de quitter le parking, plus de trace de Jean-Louis qui était censé nous ouvrir la route. Réunion de crise au ministère des transports, entre Patrice et Pascal, le numéro de portable de l’absent est enfin trouvé. Il s’ensuit alors un long échange téléphonique avec cartes IGN à l’appui. Finalement, il ressort que Jean-Louis a pris les devants et nous attend sur le site convoité. Le convoi peut, enfin, s’ébranler. Le premier stop se passe sans encombres, par contre à la première patte d’oie, Patrice part sur la gauche et Pascal vers la droite. Toutes les voitures s’arrêtent aussitôt au milieu de la route et Pascal fonce voir Patrice avec lequel il palabre encore longuement sans se soucier des quelques voitures et même un tracteur qui essayent de se frayer un chemin à travers la cohue. Finalement, un consensus est apparemment trouvé (à mon qu’ils ne se soient départagés au toss) et tout le monde peut filer vers la gauche pour retrouver notre éclaireur qui, stoïque et imperturbable, nous accueille avec un sourire en coin, ouf.
Le chemin détrempé qui mène au site du Patus, près de l’aérodrome de Saint-martin de Londres, est bien fleuri de part et d’autre ainsi qu’au milieu où pousse, notamment, un grand Polygale blanc qui, après examen chez moi, ne peut pas être P. vulgaris et dont l’échantillon que j’ai prélevé n’est pas assez complet pour que je puisse affirmer qu’il s’agit de P. comosa (il manque les feuilles du bas de la tige pour que je puisse constater qu’elles sont plus petites que celles du haut). Les soupçons sont tout de même fortement orientés vers ce dernier car tous les autres caractères notés dans Flore Med correspondent. Patrice doit aller prélever d’autres échantillons … Le passage le plus boueux abrite Gratiola officinalis (protection nationale) sûrement pour nous faire oublier nos souliers crottés pendant qu’on l’admire. L’itinéraire débouche ensuite sur un large espace surélevé occupé par une végétation basse où nous trouvons, entre autres, Achillea odorata qui n’est pas si fréquente. La sente redescend ensuite dans un bas fond peuplé d’espèces intéressantes, par exemple : Sanguisorba officinalis, Cirsium tuberosum et l’ultime objectif de notre journée, Dactylorhiza occitanica inclus dans Dactylorhiza elata pour Flore med mais validé comme une espèce à part entière dans Taxref V10. A la place de dépenser de l’argent en études plus ou moins justifiées pour trouver le logo de la nouvelle région Occitanie, nos élus auraient été bien inspirés d’utiliser celle magnifique orchidée qui aurait rassemblée tous les suffrages y compris ceux des catalans. Dites le avec des fleurs, sapristi.
C’est sereinement que chacun a repris le chemin de son logement après cette très riche sortie botanique, bien sûr, mais sûrement un peu aussi parce que Patrice ne gérait pas le retour…
Daniel F.
Le Barou (Valflaunes):
Aegilops neglecta Req. ex Bertol.
Alopecurus myosuroides Hudson
Anacamptis pyramidalis (L.) L.C.M. Richard
Anthemis arvensis L.
Aphyllanthes monspeliensis L.
Baldellia ranunculoides (L.) Parl. subsp. ranunculoides
Bellis perennis L.
Blackstonia perfoliata (L.) Hudson
Bombycilaena erecta (L.) Smolj.
Briza minor L.
Bromus erectus Hudson
Bromus hordeaceus L. subsp. divaricatus (Bonnier & Layens) K
Bromus madritensis L.
Calamintha nepeta (L.) Savi
Campanula rapunculus L.
Carex cuprina (Sandor ex Heuffel) Nendtwich ex A. K
Carex divulsa Stokes
Carex flacca Schreber
Centaurium pulchellum (Swartz) Druce
Chrysopogon gryllus (L.) Trin.
Coris monspeliensis L.
Crepis foetida L.
Crepis micrantha Czerep.
Dactylis glomerata L.
Dittrichia viscosa (L.) W. Greuter
Dorycnium pentaphyllum Scop.
Erica scoparia L.
Euphorbia exigua L.
Festuca arundinacea Schreber subsp. arundinacea
Filipendula vulgaris Moench
Fraxinus angustifolia Vahl
Fumana ericoides (Cav.) Gandoger
Genista tinctoria L.
Gladiolus x-dubius Guss.
Globularia bisnagarica L.
Helianthemum oelandicum (L.) DC. subsp. italicum (L.) Cesati
Hippocrepis comosa L.
Holcus lanatus L.
Iris spuria L.
Juncus articulatus L.
Juncus bufonius L.
Juniperus communis L.
Lathyrus aphaca L.
Lathyrus pratensis L.
Lathyrus sphaericus Retz.
Legousia speculum-veneris (L.) Chaix
Linum bienne Miller
Linum catharticum L.
Linum strictum L.
Linum suffruticosum L.
Medicago minima (L.) L.
Medicago truncatula Gaertner
Melilotus indicus (L.) All.
Mentha pulegium L.
Mentha suaveolens Ehrh.
Minuartia hybrida (Vill.) Schischkin subsp. laxa (Jord.) Jau
Muscari comosum (L.) Miller
Myosotis ramosissima Rochel
Oenanthe pimpinelloides L.
Onobrychis supina (Chaix) DC.
Ophrys scolopax Cav.
Orchis coriophora L. subsp. fragrans (Pollini) K. Richter
Orchis coriophora x Serapias vomeracea
Papaver argemone L.
Papaver rhoeas L.
Phleum pratense L.
Plantago serpentina All.
Poa trivialis L.
Polygala exilis DC.
Pyrus amygdaliformis Vill.
Ranunculus arvensis L.
Ranunculus bulbosus L.
Ranunculus trichophyllus Chaix
Rapistrum rugosum (L.) All.
Rosa micrantha Sm.
Rumex crispus L.
Sanguisorba minor Scop.
Satureja montana L.
Schoenus nigricans L.
Scirpoides holoschoenus (L.) Sojak
Serapias vomeracea (Burm.) Briq.
Silene latifolia Poiret subsp. alba (Miller) Greuter & Burde
Thesium divaricatum Jan ex Mert. & Koch
Thymus embergeri Roussine
Thymus vulgaris L.
Trifolium lappaceum L.
Trifolium squamosum L.
Ulmus minor Miller
Veronica anagallis-aquatica L.
Vicia hybrida L.
Vicia pannonica Crantz subsp. striata (M. Bieb.) Nyman
Mare de St-Etienne de Gabriac:
Aphyllanthes monspeliensis L.
Buxus sempervirens L.
Euphorbia nicaeensis All.
Genista scorpius (L.) DC.
Globularia bisnagarica L.
Gymnadenia conopsea (L.) R. Br.
Iris spuria L.
Juniperus oxycedrus L.
Juniperus phoenicea L.
Linum campanulatum L.
Linum suffruticosum L.
Lotus delortii Timb.-Lagr. ex F.W. Schultz
Orchis laxiflora Lam.
Polygala exilis DC.
Polygala vulgaris L.
Schoenus nigricans L.
Le Patus (aérodrome Mas de Londres):
Achillea odorata L.
Aristolochia rotunda L.
Carex cuprina (Sandor ex Heuffel) Nendtwich ex A. K
Carex distans L.
Dactylorhiza occitanica Geniez, Melki, Pain & Soca
Fraxinus angustifolia Vahl
Gratiola officinalis L.
Koeleria vallesiana (Honckeny) Gaudin
Lotus maritimus L.
Oenanthe pimpinelloides L.
Orchis laxiflora Lam.
Sanguisorba officinalis L.
Scirpoides holoschoenus (L.) Sojak
Stipa eriocaulis Borbas
Thymus vulgaris L.
Daniel F.